Lettre de M. l’abbé de Cacqueray aux prêtres du District de France au sujet de la Déclaration du 27 juin 2013

Cher Monsieur l’abbé,

La Déclaration doc­tri­nale des évêques de la Fraternité du 27 juin 2013 exprime avec net­te­té et avec force le com­bat de la Foi qu’elle doit livrer dans les cir­cons­tances de la crise dans l’Eglise où elle est ame­née à vivre.

La véri­té catho­lique et la dénon­cia­tion des héré­sies et de la per­ver­sion de l’esprit de ce temps d’apostasie s’y trouvent expo­sées. Il faut prier pour que cette Déclaration aide les auto­ri­tés de l’Eglise à se rendre enfin compte de la dis­so­lu­tion tou­jours plus grave de la Foi catho­lique où les conduisent les erreurs du concile Vatican II . Il faut espé­rer éga­le­ment qu’elle confor­te­ra nos fidèles dans leur atta­che­ment à cette unique véri­té catho­lique et qu’elle les réconfortera.

Après avoir reti­ré la Déclaration doc­tri­nale du 15 avril 2012 et après avoir rap­pe­lé les posi­tions de la Fraternité dans la der­nière Lettre aux amis et bien­fai­teurs, notre Supérieur géné­ral com­mu­nique main­te­nant cette autre Déclaration. Qu’il en soit vive­ment remer­cié. Donnée à l’occasion des 25 ans des sacres épis­co­paux de 1988 et dans le sillage des entre­tiens doc­tri­naux avec le Saint Siège, elle revêt une impor­tance his­to­rique pour réaf­fir­mer la nature du com­bat à mener.

Quelles que soient les dif­fi­cul­tés et les inquié­tudes de ces deux der­nières années, consta­tons dans ce texte que les posi­tions de la Fraternité sont clai­re­ment exprimées.

Cependant, comme le para­graphe 11 de ladite Déclaration a pro­vo­qué cer­taines inter­ro­ga­tions, j’en pro­fite pour y appor­ter quelques pré­ci­sions. Ce para­graphe se contente d’exposer deux évo­lu­tions pos­sibles des auto­ri­tés romaines. La pre­mière est que ces auto­ri­tés reviennent bien­tôt à la Tradition et à la Foi de tou­jours. La seconde conjec­ture une phase inter­mé­diaire où Rome recon­naî­trait à la Fraternité le droit de pro­fes­ser inté­gra­le­ment la Foi et de reje­ter les erreurs qui lui sont contraires, avec le droit et le devoir, recon­nus à la Fraternité, de s’opposer publi­que­ment aux erreurs et aux fau­teurs d’erreurs, quels qu’ils soient.

Il est impor­tant de noter qu’il n’est aucu­ne­ment dit, dans ce deuxième cas de figure – fort hypo­thé­tique au demeu­rant – que la Fraternité accep­te­rait alors sa recon­nais­sance cano­nique « ipso fac­to ». Les cir­cons­tances seraient alors minu­tieu­se­ment étu­diées pour voir ce qu’il est pru­dent de faire ou de ne pas faire pour contri­buer au bien de l’Eglise.

Par ailleurs, en aucune manière la décla­ra­tion du 27 juin ne fait la demande de pou­voir s’opposer aux erreurs et aux fau­teurs d’erreurs, pour la bonne rai­son qu’elle n’a nul­le­ment besoin de l’autorisation de Rome pour le faire comme elle l’a tou­jours fait jusqu’ici. Elle espère sim­ple­ment que Rome lui en recon­naî­tra un jour le droit, mais ce droit, elle sait qu’elle le pos­sède déjà. Elle espère même que Rome lui en fera un devoir, mais ce devoir, elle sait qu’il lui incombe dès à présent.

Enfin, après avoir moi-​même posé la ques­tion à nos Supérieurs, je me suis enten­du répondre que cette seconde hypo­thèse sup­po­se­rait un pape qui ne serait plus moder­niste, un pape qui serait donc dégri­sé des erreurs libé­rales et moder­nistes, mais qui se trou­ve­rait très faible et iso­lé. Voilà quel est le pape qui pour­rait nous recon­naître expli­ci­te­ment le droit et le devoir de nous oppo­ser publi­que­ment aux erreurs et aux fau­teurs d’erreurs, sans qu’il soit encore ques­tion de recon­nais­sance canonique.

Le texte de la Déclaration ne répond-​il pas d’ailleurs lui-​même à cette inter­ro­ga­tion ? Je crois que oui. Car il sem­ble­rait contra­dic­toire qu’un pape tou­jours moder­niste et libé­ral fasse à la Fraternité un droit et même un devoir de s’opposer publi­que­ment aux erreurs et aux fau­teurs d’erreurs (c’est-à-dire à lui-​même, qui serait tou­jours pri­son­nier de ces erreurs).

Prenons un exemple tiré du monde de l’entreprise. Dans le droit du tra­vail, on parle de « faute lourde » lorsqu’un des employés com­met une action par­ti­cu­liè­re­ment grave, diri­gée contre le bien com­mun de son entre­prise. Cette faute par­ti­cu­liè­re­ment grave doit être immé­dia­te­ment sanc­tion­née par une mise à pied, en atten­dant un licen­cie­ment. On ne conçoit donc évi­dem­ment pas qu’un chef d’entreprise fasse à l’un de ses employés le droit et le devoir de com­mettre des « fautes lourdes » contre son entreprise !

C’est pour­tant ce que ferait un pape libé­ral ou moder­niste s’il recon­nais­sait à notre Fraternité le droit et même le devoir d’attaquer les erreurs et les fau­teurs d’erreurs dans l’Eglise. Cela revien­drait à ce qu’il recon­naisse à la Fraternité le droit et le devoir de com­mettre des fautes lourdes, non pas contre l’Eglise certes, mais contre l’église conci­liaire et contre lui-​même. En réa­li­té, un tel pape, à moins qu’il ne soit deve­nu fou, serait « rede­ve­nu catho­lique » pour ain­si favo­ri­ser les attaques contre cette église conciliaire.

Bien sûr, on peut tou­jours se deman­der si cela ne pour­rait pas aus­si dis­si­mu­ler une tac­tique ou si ce pape ne dési­gne­rait pas, par les mots de libé­ra­lisme et de moder­nisme, autre chose que ce qu’ils sont réel­le­ment. Tout est pos­sible et tout serait à sou­pe­ser atten­ti­ve­ment dans un tel cas. Mais, c’est jus­te­ment pour ce motif que la Déclaration se garde bien de dire que la consé­quence serait notre accep­ta­tion d’une recon­nais­sance canonique.

Il serait vrai­ment para­doxal et une œuvre du diable que de vou­loir quit­ter la Fraternité alors qu’une telle Déclaration vient d’être pro­duite. C’est sous la hou­lette de notre Supérieur géné­ral, et non pas en francs-​tireurs, que nous devons conti­nuer à mener le com­bat de la Foi.

Combattons donc fer­me­ment, de tout notre cœur, en nous appuyant en par­ti­cu­lier sur cette Déclaration. Combattons avec intel­li­gence et pru­dence, avec esprit sur­na­tu­rel et dans l’obéissance à nos Supérieurs. Combattons pour la gloire de Dieu et pour le salut des âmes qui nous sont confiées.

Combattons sans zèle amer, sans las­si­tude et sans aigreur. S’il arrive que nous pen­sions que nos Supérieurs ne s’y prennent pas comme il faut dans le com­bat, n’hésitons pas à nous en ouvrir à eux mais ne mur­mu­rons pas entre nous.

Du moment que l’étendard de la Foi est fiè­re­ment déployé contre les héré­sies et la folie du monde moderne, sachons pas­ser sur tout ce qui reste acces­soire et acci­den­tel. Nous avons déjà bien de la chance d’être, en ces temps d’apostasie, les membres de cette pha­lange de prêtres catho­liques qui défendent l’honneur de Notre-​Seigneur Jésus-​Christ. Si nous croyons avoir été par­fois vic­times d’injustices ou d’incompréhensions, ou si nous le sommes réel­le­ment, deman­dons la grâce de savoir nous en réjouir et offrons-​les en sacri­fices pour ce grand com­bat de notre Foi.

Nous espé­rons de tout cœur que cette Déclaration doc­tri­nale per­met­tra à ceux qui ne sont plus avec nous, évêque, anciens membres de la Fraternité ou com­mu­nau­tés amies, de reve­nir au ber­cail. Nous citons spé­cia­le­ment l’abbé Olivier Rioult. Puisse cette Déclaration doc­tri­nale du 27 juin 2013 l’aider désor­mais à com­prendre que ses confé­rences dénoncent à tort la tra­hi­son et le ral­lie­ment de la Fraternité.

Nous invi­tons donc cha­cun à demeu­rer ferme dans la Foi et à ne pas pen­ser qu’il exis­te­rait comme « un état de néces­si­té dans l’état de néces­si­té », qui dis­pen­se­rait désor­mais de deman­der des auto­ri­sa­tions et qui per­met­trait de prendre n’importe quelle initiative.

A ce pro­pos, je signale que le livre com­po­sé par l’abbé Pivert n’a pas été inter­dit de dif­fu­sion par la Maison géné­rale. C’est une rumeur dénuée de fon­de­ment, véhi­cu­lée par le « Courrier de Tychique » de Monsieur Max Barret, qui a affir­mé que je l’aurais lais­sé se vendre contre l’autorisation de nos Supérieurs. La réa­li­té est que nos Supérieurs ne m’ont pas deman­dé de reti­rer ce livre de la dif­fu­sion. J’ai deman­dé à Monsieur Barret de bien vou­loir rec­ti­fier cette inexactitude.

Enfin, j’ai la joie de vous annon­cer le lan­ce­ment du site « vatican2enquestions » le lun­di 1er juillet 2013, en ce vingt-​cinquième anni­ver­saire, presque jour pour jour, des Sacres de 1988.

J’avais eu l’occasion, lors de la der­nière ses­sion des prieurs à Flavigny, d’expliquer les motifs à l’origine de cette ini­tia­tive. Ce site nous per­met­tra, en par­ti­cu­lier, de mon­trer que l’essentiel de tout ce qui se dit et se fait au nom de l’Eglise, aujourd’hui, trouve ses véri­tables racines dans le Concile. J’ai eu la joie de pou­voir mon­trer ce matin à Nos Seigneurs Fellay et de Galarreta, de pas­sage à Suresnes, ce site nou­vel­le­ment ouvert.

Je vous prie de bien vou­loir agréer, cher Monsieur l’abbé , l’expression de toute mon espé­rance et de mon dévoue­ment sacer­do­tal dans le Cœur Douloureux et Immaculé de Marie,

Suresnes, le 2 juillet 2013

Abbé Régis de CACQUERAY, Supérieur du District de France de la FSSPX

Capucin de Morgon

Le Père Joseph fut ancien­ne­ment l’ab­bé Régis de Cacqueray-​Valménier, FSSPX. Il a été ordon­né dans la FSSPX en 1992 et a exer­cé la charge de Supérieur du District de France durant deux fois six années de 2002 à 2014. Il quitte son poste avec l’ac­cord de ses supé­rieurs le 15 août 2014 pour prendre le che­min du cloître au Couvent Saint François de Morgon.